Published On: jeu, Juin 13th, 2019

Comment Arsalane Tibari m’a appris à prononcer le U

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Par Mustapha Jmahri—

Au Maroc, les enseignants de l’arabe et du français de l’ancienne génération étaient véritablement des pédagogues nés. Ils usaient de mille et une astuces pour faire évoluer les élèves. Devant la difficulté qu’ont leurs homologues aujourd’hui pour enseigner et aider les élèves à assimiler les leçons de langue et de grammaire, on ne peut que saluer le travail de leurs aînés et leur sens pédagogique.

Ainsi faire apprendre la prononciation adéquate de langue française aux Maghrébins n’a jamais été chose facile pour des élèves débutants du primaire, notamment pour certaines voyelles comme le E ou le U. Ces deux voyelles sont prononcées différemment en langue arabe, ainsi l’écolier marocain aura tendance à prononcer le U « OU » ou « O ».  Ce qui donnera « j’ai bou » au lieu de « j’ai bu ».

L’ami Brahim Benasser, retraité et ancien responsable de la base nautique d’El Jadida, m’a raconté récemment que c’est grâce à Arsalane Tibari, son maître de français, qu’il a appris la bonne prononciation. Il suivait des cours particuliers de langue française chez feu Arsalane Tibari, leur voisin au quartier el-Kelâa. Ce dernier était une personnalité connue à El Jadida puisque c’est lui qui avait pris la relève de Marcel Ratel comme premier directeur marocain de l’école de l’avenue de la Résistance (ex avenue Foch). D’ailleurs la municipalité a baptisé une rue d’El Jadida à son nom.

Une anecdote : Brahim avait des difficultés pour prononcer le U. Il le répétait sous la forme de O. Feu Arsalane Tibari n’y alla pas par quatre chemins. Il lui dit le premier jour :

  • Écoute-moi Brahim. as-tu déjà pris la calèche pour aller en ville ?

Brahim acquiesça. Le maître continua :

  • Donc tu as entendu le cocher crier à ses chevaux « Hue ! » parce que s’il avait dit « OOO » les chevaux n’auraient rien compris. Alors à chaque fois que tu es devant un U, tu te rappelleras le cri du cocher.

Démonstration réussie et la leçon a été retenue à cent pour cent puisque l’ami Brahim, né dans les années trente, se rappelle toujours ce conseil comme si c’était hier. Mais hélas au Maroc la transmission des expériences entre les générations, en matière d’enseignement, me semble avoir échoué et c’est ainsi qu’on a l’impression de tout recommencer à chaque fois à zéro.

jmahrim@yahoo.fr

Photo : Brahim Benasser (tenant le verre de thé) avec Abdellah El-Aroui à El Jadida (10 juin 2019)

Arsalane Tibari 67-68

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