Published On: ven, Mai 31st, 2019

Comment Dr Bouganim a sauvé la vie du petit Patrick à El Jadida ?

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Par Mustapha Jmahri (écrivain)–

 Patrick Péchin est né à Rabat en 1948. A l’indépendance du Maroc, sa famille s’installa à El Jadida où son père était directeur de banque. À l’âge de onze ans, il fut victime d’une erreur médicale : il attrapa une grave maladie en se rendant à l’hôpital d’El Jadida. Grâce au dévouement du Dr René Bouganim, il put être sauvé d’une mort certaine. Ayant lu mon article paru sur le site mazagan24, le 23 mai 2019 au sujet du décès de ce médecin, Patrick Péchin, aujourd’hui retraité après avoir été banquier en France, a voulu nous rappeler comment Dr Bouganim lui avait sauvé la vie.

Mon père Lucien Péchin, né à Rabat, a travaillé à El Jadida, de 1957 à 1961, où il était directeur du Crédit Foncier d’Algérie et de Tunisie qui deviendra par la suite Banque Marocaine du Commerce Extérieur (BMCE). Nous habitions au dessus de la banque dont le siège se trouvait en face de la chambre de commerce et d’industrie. C’est là, dans cette maison, que le docteur René Bouganim, un des clients de mon père, venait me soigner. Son épouse venait souvent voir ma mère avec son petit bébé nommé Philippe.

Quand j’y pense, je trouve cette histoire assez extraordinaire, car lorsque  je suis tombé malade en 1960, j’ai failli mourir à cause d’une aiguille mal désinfectée utilisée dans l’hôpital régional d’El Jadida dirigé alors par le docteur Antoine Carbou. J’avais 11 ans et j’étais en sixième au collège de Mazagan, aujourd’hui lycée ibn Khaldoun. J’avais une petite copine de classe, Renée Carbou, fille du même médecin-chef de l’hôpital.  Renée n’a jamais su que j’avais failli mourir à cause de cette négligence médicale…Jusqu’à cette année 2019 où j’ai pu revoir Renée  à Arles où elle a pris sa retraite de pharmacienne et, comme nous évoquions nos souvenirs d’El Jadida, je lui ai raconté toute l’histoire….elle n’en revenait pas !

J’éprouve un immense respect envers le docteur Bouganim qui, guidé par sa profonde humanité, avait ressenti comme une terrible injustice la perte d’une vie qui n’en est qu’à ses débuts et il en avait littéralement fait une affaire personnelle. Il vint me voir tous les jours pendant six mois.  Je suis resté allongé et, n’ayant plus de fonction hépatique, je ne pouvais m’empêcher de me gratter si bien que j’étais couvert de plaies. Un supplice. Il se tenait  en permanence informé  des  avancées scientifiques concernant cette maladie, qui je le rappelle était une hépatite C et qui était mortelle. Je ne me souviens plus vraiment des médicaments que me prescrivait le docteur Bouganim mais il passait chaque jour et était, de son propre aveu, totalement dépourvu de remèdes pour soigner cette maladie. Il pansait surtout mes plaies pour qu’elles ne s’infectent pas. Mais à l’époque, aucun traitement ne permettait de combattre ce mal. Lorsqu’il est venu annoncer à mes parents, la sortie du médicament américain, le Décadron, il ne me restait, à ses dires, qu’une quinzaine de jours à vivre …! Ça, je ne l’ai jamais oublié.

Ainsi, ce qui fait la valeur de l’intervention du Dr Bouganim, outre les soins quotidiens, c’était sa surveillance assidue des progrès dans la lutte contre cette maladie qui a fait qu’in extremis, il a pu utiliser ce médicament américain qui venait juste de sortir ! Sauvé d’une mort certaine, j’ai pu reprendre mes activités scolaires et sportives, je fréquentai alors assidûment le dojo du maître Yacoubi qui nous enseignait le judo avec beaucoup de brio et j’en ai gardé jusqu’à ce jour un excellent souvenir !…

Plus tard j’ai fait mon service militaire, et, à ce propos, une anecdote qui concerne El Jadida. Comme j’étais dans les commandos de l’air, nous avons fait notre premier saut en parachute en partant de la base de Nîmes Garons. Là, on a pris notre équipement pour s’aligner en stick devant le Noratlas qui devait nous larguer ; c’est alors que j’examinai mon parachute, je vis une étiquette  qui était cousue sur le paquetage avec écrit dessus MAZAGAN. J’ai dit à mes copains de saut :  » Tiens voilà qui est curieux, je saute avec un parachute qui porte le nom de ma ville d’enfance ». Ce n’est qu’une trentaine d’années plus tard, en lisant un article dans le bulletin de l’amicale des anciens de Mazagan que j’ai appris qu’il y avait à El Jadida une fabrique de parachute. C’est tout de même une histoire étonnante!

Pour conclure, j’adresse un éternel merci au docteur Bouganim et au maître Yacoubi, l’un m’a rendu la vie et l’autre m’a appris à lutter pour elle. Comme Victor Hugo le disait déjà : « Ceux qui vivent, ce sont ceux qui luttent. »

jmahrim@yahoo.fr

Photo : Patrick Péchin, à droite, en salle de judo à El Jadida en 1960

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