Published On: jeu, Juin 21st, 2018

Robert Gras ancien postier à El Jadida

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 Par Mustapha Jmahri (écrivain)vv

Robert Gras est né en France à La Rochelle et c’est à l’âge de deux ans qu’il arriva avec sa famille au Maroc. Il y passa trente ans de 1928 à 1958 soit toute sa jeunesse. C’est ainsi que le petit Robert, au gré des affectations de son père douanier, vécut à Casablanca et Kenitra. Robert fit ses études au lycée Lyautey à Casablanca et c’est là qu’il rencontra des élèves venus d’El Jadida tels Lilo Moyal, Jack Benarroch, Maurice Yacoubi entre autres.

A 17 ans, il est appelé sous les drapeaux au déclenchement de la Seconde Guerre mondiale. Il passa trois ans dans l’aéronavale d’abord à Khouribga puis à Agadir et en Algérie. A Agadir, il participa à la surveillance aérienne de la côte entre cette capitale du Souss et Dakar via la Mauritanie. Le but était de surveiller l’apparition de sous-marins allemands qui attaquaient les bateaux américains.

De retour dans le civil, Robert travailla à la poste de Casablanca. Mais, une fois marié, il demanda son affectation à la poste d’El Jadida en 1947. Cette mutation fut facilitée par l’intervention de M. Dupré qui était président de la chambre de commerce d’El Jadida. Ainsi Robert rejoignait sa future épouse, Suzanne Tanguy, institutrice à l’école franco-musulmane de derb Touil dirigée alors par M. Boissy. Ce dernier sera remplacé plus tard par Mohammed Aït Kaci. Robert se rappelle que son arrivée à El Jadida coïncida avec la fin de la démolition du casino de la plage.

La femme de Robert était issue d’une famille de sportifs. Elle même, Suzanne Tanguy, était championne du Maroc de natation, sa sœur Gaby avait été championne du Maroc et de France aux Jeux Olympiques de 1952 à Helsinki et le père, Francis Tanguy, avait participé aux jeux interalliés comme plongeur de haut vol.

Robert habita rue Anatole France qui débouchait sur le collège ibn Khaldoun chez Mme Tissier, sœur de Mme Dufour la propriétaire du cinéma Paris. Le mari de Mme Tissier, connu à El Jadida comme entrepreneur de travaux publics, réalisa de nombreuses routes lors de la période 1910- 1912. Ses voisins de pallier n’étaient autres que les Faraché, les Golfand et la famille Guelfi dont le fils sera connu comme « Dédé la sardine » et dont le père dirigeait à El Jadida l’agence Paquet.

A la poste d’El Jadida, il travailla auprès de Français, Marocains et autres employés de différentes nationalités. Il comptait parmi ses amis Cherif Kasmi, Mouine, Peraldi, Abitbol, Léon El Kaïm, Michon, Gaston Giraudel, Hélène Morel et Chatillon. Au service du standard téléphonique, il y avait une vingtaine de jeunes filles, sous la responsabilité de Mme Michon. En ce temps-là, l’activité principale du bureau de poste était surtout la gestion du courrier et le paiement des différents mandats et pensions pour les anciens militaires, les retraités et les familles de militaires morts pour la France pendant la guerre.

La poste connaissait alors une grande activité. Il y avait par ailleurs, dans la campagne doukkalie, des agences postales assurées par des colons comme celle de M’tal tenue par les frères Dieudonné ou celle de l’oulja tenue par le grec Stèlios. Le courrier pour Oualidia, à 70 km d’El Jadida, était acheminé par deux facteurs à bicyclette. L’un partait d’El Jadida et l’autre de Oualidia, ils se rencontraient à mi-chemin pour échanger leurs sacoches. C’était comme ça tous les jours, été comme hiver, et ça a bien marché.

Quand la famille de Robert se fut agrandie par l’arrivée de deux enfants, nés tous deux à El Jadida, il déménagea au Plateau à la villa Bon Accueil sur l’avenue principale menant vers le petit aérodrome. En face de chez lui habitait le policier Bois-de-Que célèbre par sa méchanceté et que les Marocains appelaient « Fama » parce qu’il tordait la lèvre. Un jour, suite à un malentendu, ce policier avait menacé Robert avec son arme et, au lendemain de l’Indépendance, il voulait tirer sur les gens avec sa mitraillette.

Robert précise que la vie à El Jadida était calme et qu’une bonne ambiance régnait entre Marocains, musulmans, juifs et autres étrangers. Le dimanche, il allait avec sa femme au petit cinéma de Mme Dufour ou allait à la pêche avec Moyal, son collègue postier. Ce dernier émigra par la suite aux USA en 1957. Robert aimait aussi siroter un verre au bistrot, en face de la poste, tenu par un Marocain dit « Topaze ». Celui-ci se tua dans un accident de voiture et Robert en eut une grande peine car la voiture avec laquelle Topaze avait trouvé la mort lui avait appartenue auparavant. Il l’avait vendue à un mécanicien qui l’avait cédée ensuite à Topaze.

Si beaucoup d’Algériens et de Français d’Algérie étaient venus au Maroc à cette époque du Protectorat pour y travailler et s’y établir c’était, selon Robert, parce que le Maroc était considéré comme une terre bénie où il faisait bon vivre. Mais il y eut quand même, selon Robert, certaines aberrations liées à la conjoncture de l’époque. Par exemple, à la piscine de l’hôtel Marhaba, les jeunes pouvaient venir s’initier à la natation avec Robert qui en était le maître-nageur, mais les jeunes Marocains en étaient interdis.

Après un séjour d’une douzaine d’années à El Jadida, Robert quitta cette ville en 1958 pour continuer sa carrière dans l’administration postale en France, à Dinan, ville bretonne des Côtes d’Armor.

jmahrim@yahoo.fr

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Displaying 2 Comments
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  1. Jean giraudel dit :

    Bonsoir je suis né à mazagran en 1929 mon frère Pierre en1927 a enseigné à l’ecole des notables habite à Bergerac ,ma sœur en 1926 habite à mussidan Dordogne a enseigné à l’Ecole misulmane.J’ai perdu ma femme et j’habite à Tarbes 6 rue Kestler auprès de Mes Deux garçons,ayant quitté Hyeres. Je communique beaucoup avec Jojo Rousier .je vous souhaite une bonne soirée,et à très bientôt d’autres nouvelles

  2. Bonsoir Je suis né à Mazagan en 1929 .Mon Père travaillé à la poste depuis 1924 à la retraite il a pris la station service mobiloil route de Marrakech Mon frère était instituteur à l’ecole des notables Pierre ,ma soeure institutrice avec madame Boissi ,Arlette,moi jean professeur à Safi à l’ecole Du plateau .Ayant perdu ma Femme de Hyeres ,je me suis rapproché de mes deux garçons à Tarbes .J’espere avoir d autres nouvelles de Mazagan ce petit coin merveilleux où j’ai passé toute ma jeunesse .Mes sentiments les meilleurs.

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