Published On: dim, Mai 1st, 2016

A bâtons rompus avec l’historien Philippe Marchat à Neuilly

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         Par Mustapha Jmahri (écrivain)avec marchat

 C’est chez lui, dans la belle ville de Neuilly-sur-Seine, que m’a reçu l’historien et écrivain Philippe Marchat qui, auparavant, en 2011, avait préfacé mon livre « Mazagan-El Jadida, Deux siècles d’histoire consulaire ». Ce Français de Rabat, un pur Rbati de longue date comme il aime le dire, a fait une carrière prestigieuse : il a occupé en France, en Europe et en Afrique, d’importantes fonctions de conseil et de direction auprès notamment d’Antoine Pinay et de Valery Giscard d’Estaing. Il occupa également le poste important de directeur général de la Banque Européenne d’Investissement, et en 1996, à Paris, il était chef de la Mission interministérielle pour la préparation à l’euro.

Philippe Marchat connait bien le Maroc du nord au sud. Il était arrivé à Rabat, avec sa famille en 1932, alors qu’il n’avait que deux ans. Son père était un grand personnage du Protectorat : Henry Marchat, diplomate était en charge de la liaison quotidienne entre le Résident général et le sultan Mohammed V. Le père de Philippe Marchat était arrivé au Maroc d’abord comme consul, après avoir été en poste à Berlin, Londres et au cabinet d’Aristide Briand à Paris. A Rabat, il fut successivement chef du cabinet diplomatique à la résidence générale, conseiller du gouvernement chérifien pendant la guerre, ministre plénipotentiaire puis conseiller diplomatique du protectorat. Ce père a consacré vingt ans de sa vie de diplomate au Maroc, pays qu’il aimait comme sa seconde patrie.

De ce fait, Philippe passa toute son enfance au Maroc où il a fait ses études primaires à l’école de l’Aguedal puis secondaires au lycée Gouraud de Rabat. Lors de ses études universitaires en France, il revenait régulièrement en vacances chez ses parents jusqu’en  1952. Cette vie familiale dans la meilleure société lui a permis de  connaître aussi bien le Résident général de l’époque, le général Noguès, que le sultan Mohammed V et d’autres personnalités. D’ailleurs, c’est au Maroc qu’il a connu sa femme, Nicole, qui n’est autre que la fille du général Duval alors Commandant supérieur des troupes du Maroc.

Puis, dans le cadre de la politique de coopération, le groupe de la Caisse de Dépôts et Consignations, auquel Philippe appartenait à l’époque, avait créé la Société Centrale pour l’Equipement du Territoire (la SCET Maroc).

J’ai eu l’occasion de rencontrer Philippe Marchat et son épouse,  la première fois à El Jadida en mai 2011, quand il était venu avec une délégation française dans le cadre d’un voyage d’études au Maroc organisé par l’association française Réalités et Relations Internationales (ARRI). J’avais découvert un intellectuel très ouvert, simple et très sympathique. Ce dimanche 1er mai 2011, la délégation qu’il accompagnait était composée d’une trentaine de membres et avait effectué une brève visite à Sidi Bouzid (4 km d’El Jadida). A cette occasion, Philippe Marchat m’avait invité pour présenter, devant les membres, un aperçu du patrimoine historique de la région. L’Association Réalités et Relations Internationales dont le siège se trouve à Paris est reconnue d’utilité publique. Elle réunit des personnalités ayant en commun la conviction qu’il faut promouvoir dans la société française l’idée d’une meilleure connaissance des réalités internationales.

C’est donc grâce aux livres que j’ai connu Philippe Marchat. Mais ce qui m’a poussé à solliciter une préface, c’est que j’avais constaté l’intérêt personnel qu’il portait au Maroc. Intérêt qui a débouché, entre autres, sur son travail remarquable « Le Maroc et les Puissances, un Empire convoité. De 711 à 1942 », ouvrage de plus de 400 pages paru chez l’Harmattan. En effet, à partir des études effectuées par son père, puis des archives du Quai d’Orsay, Philippe consacra son ouvrage aux relations que la nation marocaine a entretenues, 13 siècles durant, avec « les Puissances » – terme cher aux chancelleries. Objet de nombreuses convoitises, le Maroc a été l’objet d’un double protectorat français et espagnol, jusqu’à ce que le débarquement américain lui ouvre une ère nouvelle. Entre nos deux livres, il y a un lien : le foisonnement des consulats étrangers à Mazagan-El Jadida n’est, en fait, que l’une des conséquences, visible à l’échelle locale, des convoitises mercantiles et politiques desdites Puissances.

Par ailleurs, le livre de Philippe Marchat a réussi à retracer trois étapes historiques du pays : d’abord le passé d’un Empire attisant l’intérêt croissant des Puissances, suivi d’une internationalisation qui a conduit à un double protectorat, et enfin, l’étape la plus contemporaine qui concerne les relations que le Maroc a entretenues avec les Puissances de juin 1940 à novembre 1942.

Ainsi, cinq ans après notre première rencontre, mon épouse et moi étions très heureux de retrouver nos amis Marchat qui rentraient juste d’un récent voyage à Oman. Nous avons parlé des péripéties de la vie, de l’actualité ainsi que de l’histoire et de nos nouveaux ouvrages. Dans notre discussion, une constante : le Maroc. Les Marchat y ont passé leurs plus belles années et aujourd’hui encore ils continuent de les faire vivre à travers l’actualité, les livres, les amis, et aussi forcement par l’art culinaire qu’ils retrouvent souvent dans les meilleurs restaurants marocains de Paris.

 

jmahrim@yahoo.fr

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