Published On: mar, Mai 5th, 2015

CRIMES ET CHATIMENTS

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Ahmed BENHIMAbenhima

Email: ahmedbenhima@yahoo.com

Parmi les sujets qui  suscitent les débats les plus vifs dans le projet du code pénal marocain soumis au débat, figure celui de la peine capitale. Les opinions émises sur cette question sont évidemment  contrastées mais les plus visibles et les plus audibles sont celles qui sont favorables à l’abolition de cette peine. Les partisans de cette thèse multiplient les appels et développent les arguments en  sa faveur  à travers les médias alliés, sur les réseaux sociaux et à travers leurs associations.
Selon eux, personne n’a le droit de disposer, sous aucun motif, sous aucun prétexte,  de la vie des gens.  Selon eux, la peine de mort ne dissuade pas, ne fait pas baisser le taux de la criminalité et ne résout point ce problème. Selon eux encore, le Maroc a signé des conventions internationales en matière de Droit de l’Homme. Il serait  donc  tenu de les respecter pour favoriser son entrée dans l’ère de la modernité et de la démocratie. Enfin, ils déclarent  que même les tribunaux internationaux qui statuent sur les crimes d’extermination de peuples  entiers ne prononcent pas cette peine. Comment admettrons-nous que  cette sentence  soit encore retenue pour des meurtres d’individus (1)? Ce sont  des points de vue que nous ne partageons pas entièrement.
A coup sûr, nous ne soutiendrons jamais une justice qui condamnerait à mort un individu à cause de ses opinions, qu’elles soient politiques ou religieuses, ou à cause de sa couleur, de sa race ou de sa nationalité.   Nous n’accepterons pas non plus un si haut niveau de sévérité  dans le cas de l’homicide involontaire, conséquence d’un acte accidentel, qui habituellement ne vise ni n’entraîne  la mort.
Par contre, nous  appelons  le maintien de cette peine dans le cas des crimes délibérés. Nous suggérons son élargissement aux cas des  agressions et des menaces à l’arme blanche avec récidive car celui qui attente avec préméditation à la vie des gens  a décidé,  d’avance et par voie de conséquence,  de se soustraire à leur clémence. Celui qui transgresse sciemment et même froidement le principe du respect de la vie humaine  doit, à notre avis, répondre de sa propre vie.  Ceci est une forme de considération posthume pour la victime et une conviction que dictent  l’amour de la vie et le respect des hommes.peine
Par ailleurs, nous savons que même si la peine capitale figure dans le code pénal marocain, elle ne s’applique point ou seulement dans des cas très rares. Comment, dans ces conditions, peut-on affirmer que  cette punition ne dissuade pas ou ne résout pas le problème de la délinquance grave ? Sur quelles statistiques de notre pays, puisque c’est de lui qu’il s’agit, se base-t-on pour conclure à l’inefficacité de cette sanction? Il suffit de se rappeler qu’un air de sécurité avait soufflé dans le pays  lorsqu’ une brève campagne sécuritaire avait été menée contre « tcharmil » (2) pour comprendre que la fermeté paye. Malheureusement, cela  n’a duré qu’un laps de temps et à nouveau, les délits ont réapparu avec encore plus d’intensité et de férocité que par le passé.
Sur un autre plan,  signalons que le Maroc n’est pas un pays où il y a le vide culturel absolu pour qu’il signe, les yeux bandés, n’importe quelle convention. Le Maroc est un pays ouvert sur le monde. Il aspire à plus de modernité, à plus de démocratie, à plus de rationalité et d’efficacité  mais rien n’y ferait admettre le risque de l’ébranlement de sa cohésion sociale, le risque  de l’insécurité de sa population qu’entrainerait  l’adhésion  à une doctrine, à un courant idéologique ou philosophique ou religieux quels qu’en soient les mobiles, les  initiateurs ou les promoteurs.

Le dernier argument des partisans de l’abolition de la peine capitale est fondé sur la notoriété des tribunaux internationaux. Ceux-ci  ne prononcent jamais la sentence de mort même dans les cas de crimes de guerres. Aussi conseillent-ils avec insistance de suivre leur modèle.  A nos yeux, cette justification n’est point convaincante. Il suffit de savoir que ces institutions sont sous le contrôle exclusif des grandes puissances qui sont responsables, à travers l’histoire ancienne et contemporaine, des pires exactions contre les humains, des pires massacres des peuples et des guerres les plus  dévastatrices pour comprendre pourquoi ce jugement ne figure pas dans les codes auxquels elles recourent. Il est inconcevable que le bourreau s’auto- condamne.  Si cela était possible, plus du tiers de l’Etat sioniste, des Républicains américains, des conservateurs et des travaillistes  anglais  et autres associés  seraient condamnés et exécutés. Ailleurs, pour de simples soupçons et de fausses accusations, Saddam et Kadhafi sont déjà sous terre, sans le moindre procès, sans le moindre scrupule. Et les exemples des deux poids deux mesures sont abondants. Qu’on ne nous donne pas en exemple ces établissements. Nos références culturelles et juridiques sont plus utiles pour nos besoins et   plus adaptées  pour nos populations.

Nous pensons, à la fin, que notre urgence c’est notre sécurité. Nous pensons que celle-ci pose, aujourd’hui, un problème dont la solution ne tolère plus aucun retard.  Nous pensons, enfin, que celle-ci nécessite une législation qui émane de  juristes qui  respectent sincèrement la vie, qui ont une parfaite connaissance de nos sociétés, de notre culture, de nos valeurs et de nos aspirations. Le débat est sans aucun doute nécessaire, les idées émises ici et ailleurs sont discutables mais la gravité de la situation appelle des actions rapides, fermes, responsables  et concrètes.
Ahmed BENHIMA
El Jadida, le 04/O5/2015

(1)     Emprunt volontaire au grand DOSTOIEVSKI
(2)     Propos recueillis dans l’émission de 2M « Moubacharatane maakoum » du 09 avril 2015.
(3)     Voir notre article paru sur FB, eljadida.com ou Mazagan 24.com

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Displaying 1 Comments
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  1. J’ai relève un grand nombre de mots et d’expressions très fortes dans ton article. preuve que le vase a débordé. D’abord le titre très révélateur, crime et châtiment, et non sanction. Ensuite, préméditation, transgression, récidive, vide culturel… Toute transgression froide et délibérée des principes de la vie humaine doit être fortement réprimandée. Or nous assistons aujourd’hui à une psychose collective. Les parents ont peur de leurs enfants, les voisins de leurs voisins, la soeur du frère, la femme du mari, le prof de ses élèves… Tout le monde a peur et on vient nous casser les oreilles avec leurs droits de l’homme!!! Accordez moi d’abord le droit à la vie, le droit à la sécurité.. Ensuite, lorsqu’un tribunal prononce la peine de mort à l’encontre d’un criminel, la sentence n’est jamais executee,. Les couloirs de la mort sont premplis de personnes qui attendent une exécution qui ne viendra jamais. Les ayant droit attendent eux aussi dans le désespoir l’exécution du criminel qui a ôté la vie de façon froide et délibérée à un ou plusieurs êtres chers de leur famille… Est ce que c’est juste?… L’abolition de la peine de mort est pour moi un slogan vide et non avenant. Une consommation pour les medias. Moi j’opte pour  » Nafsou bi nafsi oua ljirahou qissas… »

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